L'infirmerie

Mais Châa', on est en vacances, non ?

Ah oui c'est vrai! ^^

Déééébile! ^^

Hééééé!

Oui la soeur De Bérengère? ;)

Grrrrr --'

Si c'est comme ça je m'en vais et je vais regarder Veronica Mars ><'

Rooo
Boude pas! --' ;)

^^

J'ai envie d'écrire! =/
Mais j'ai beau chercher je sais pas quoi faire...--'

Ah ^^

Franchement ça m'aide --' ;)

Le lendemain, midi passé, je me dépêchais d'aller à l'infirmerie, après avoir vaguement expliqué à mes amies ce qu'il se passait.
Than avait reprit un peu de couleur, et était adossé à un oreiller. Dès que j'entrais, il me sourit, et je constatais qu'il n'avait plus sa longue barbe grise et emmêlée -de même, ses cheveux avaient été rasés.

<< Mme Krisk voulait que j'ai un air plus propre, articula-t-il -néanmoins avec un peu de mal. >>

J'allais m'asseoir sur le fauteuil, et lui tendis un sachet de biscuits de noël.

<< Tiens, c'est pour toi, fis-je. >>

Il me remercia et avala un des biscuits.

<< Je n'arrive pas à me rendre compte que tu es là...murmurais-je, au bord des larmes. Tout ce temps, que j'ai passé seule...
-Chuut, me rassura-t-il en me caressant la tête. Je suis là, maintenant...
-Et tu vas rester? M'enquis-je, pleine d'espoir.
-Oui. Je serais là jusqu'au trépas, Châan.
-Et...que vas-tu faire? >>

Il haussa les épaules.

<< Peut-être faudra-t-il que j'aille aux Terres Brunes pour récupérer mon argent, puis...je m'installerais ici.
-Mais, justement...fis-je en fronçant les sourcils. Comment as-tu débarqué à l'Académie?
-J'ai rassemblé toutes mes forces pour me téléporter... >>

Than allait de mieux en mieux, et je passais le plus clair de mon temps à son chevet. Je lui parlais de ces mois passés à l'Académie, de mes amis, que je me sentais enfin chez moi, et lui me parlait de l'horreur que lui inspirait Fetrus...

<< Si je n'étais pas venue au monde, tu n'aurais jamais vécu tout cela, soupirais-je.
-Ne dis pas ça, tu as autant ta place que quiconque sur cette terre. >>

Je sortis de ma poche le poignard que Nup m'avait taillé, et lui montrais.

<< C'est Nup qui me l'a fait...murmurais-je. Il avait le même don que toi, et...il aurait été un grand armurier. >>

Ma gorge se noua.

<< Il aurait été? Siffla Than. >>

Je lui serrai la main. Il fallait que je lui dise la vérité, il avait le droit de savoir.

<< Je t'ai menti, Than...chuchotais-je. Nup...est mort. Juste avant que tu revienne. >>

Les yeux du vieil homme se voilèrent douloureusement.

<< Il...s'est suicidé. >>

Than fixa le plafond, et de longues larmes s'écoulèrent sur ses joues poudreuses.

<< Tu es tout ce qu'il me reste...pleura-t-il en me resserrant la main.
-Je lui ai promis...de veiller sur toi, lui dis-je. >>

Lorsque j'entrais dans la pièce attenant à l'infirmerie, je constatais avec stupeur que Than n'y était plus.
Ahàron perçut de suite mon inquiétude et posa une main délicate sur mon épaule, envoyant des ondes de plaisir le long de mon échine. Mme Krisk entra alors en souriant.

<< Bonjour, Châan, me salua-t-elle.
-Than n'est pas là? murmurais-je.
-Non, il est sortit se promener aux alentours du lac.
-Il peut marcher? M'exclamais-je.
-Oui, depuis ce matin, sourit l'infirmière. Il se porte vraiment bien, il a reprit de belles couleurs et n'a plus une once de fatigue.
-Et...le début de gangrène?
-Landy m'a beaucoup aidée à le soigner. Nous avons désinfecter la plaie, enlevé tout le pus, et le voilà désormais hors de danger. >>

La bonne nouvelle me fit sourire jusqu'aux oreilles.

<< Par contre, je ne vais pas pouvoir le garder indéfiniment ici, me dit-elle. Il faudrait qu'il se trouve un logement, j'ai encore beaucoup de malades, et cette pièce est la plus confortable. >>

J'acquiesçais. Mais...il n'aurait jamais assez de place dans ma chambre, et puis Mme Crèzir ne l'autoriserait jamais à vivre dans l'Académie.

<< Je trouverais vite une solution, la rassurais-je. >>

Même si pour cela il faut retourner une dernière fois aux Terres Brunes...pensais-je avec amertume.

Toute sa fortune s'y trouvait, il serait bien forcé de récupérer son argent.

Than m'attendait, tout sourire, assis sur son lit. Dès qu'il me vit, ses yeux prirent une teinte joyeuse, même si la douleur restait en lui. Je m'approchais doucement et serrais sa main dans la mienne, d'un geste réconfortant. Jamais plus il ne serait aussi heureux qu'avant, car il avait perdu sa chair, son fils, celui qu'il avait élevé et aimé plus que tout. Mais il restait moi, sa fille, oui, et il m'avait dit que j'étais désormais la seule raison qui l'attachait au monde.

<< Tu as reprit des couleurs, soulignais-je gentiment.
-Je vais bien, confirma-t-il. >>

Mais sa voix restait ombrée, mélancolique.

<< Il t'aimait, murmurais-je. Tu étais pour lui le meilleur père du monde... >>

Than regarda tristement ses mains.

<< ça ne la pas empêché de ce jeter de ce toit.
-Il était désespéré... fis-je d'une voix étranglée. Mais tu es celui qu'il aimait le plus profondément. >>

Il acquiesça, puis je l'aidais à se relever. Il était temps de partir, d'emménager chez Kade. Mme Krisk arriva, le rose aux joues.

<< Salut Than, le salua-t-elle , puis à mon intention: Bonjour Châan. Je t'ai apporté quelques vêtements pour la suite! >>

Elle déposa dans les bras de Than un petit sachet rempli de vêtements, puis bredouilla:

<< Bon, eh bien...c'est l'heure des séparations. Je viendrais te voir, Than, promis. >>

Than lui fit un grand sourire, et l'embrassa sur les deux joues.

<< Je te remercie, Esmé, lui dit-il. J'attendrais tes visites avec impatience. >>

Esmé? Tu? Je ne savais pas qu'ils se tutoyaient. Je souris intérieurement, puis nous sortîmes de l'infirmerie. Maintenant...il allait falloir que j'ai affaire à Will, car je devais aller chercher un cheval aux écuries.
Will... je regrettais d'avoir couché avec lui sans aucun sentiment... Mais il me comprendrait. Lui non-plus ne m'aimait pas.

Pouaah. Combien de fois avais-je mit les pieds dans l'infirmerie? La prochaine fois que j'aurai à le faire, je me suiciderais.

Ahàron était allongé sur un lit blanc, propre, et, les yeux fermés, il semblait voler dans des limbes qui m'étaient inconnues. C'était d'une beauté si délicieuse, infâme, cruelle et si triste, que ma poitrine se souleva en un hoquet sourd. Si cette vision angélique était causée par ma faute, alors...alors je me détestais. En même temps, ça ne paraissait pas vraisemblable. Ahàron était un des êtres les plus forts qu'il m'avait été donné de me rencontrer, et rien qu'imaginer le fait que j'ai eu assez de force mentale pour l'envoyer dans le coma...ça paraissait ridicule.

- Ahàron... chuchotais-je en m'approchant du lit.

Mme Krisk, au tact efficace, se retira pour me laisser seule à son chevet.
Je pris la main glacée d'Ahàron, et la serrait à m'en blanchir les jointures.

- Qu'est-ce que je t'ai fait, bon sang? Gémis-je, secouée de larmes.

Et Kia', et Nelkh', qui étaient peut-être mortes, désormais. Jamais je ne m'étais sentie aussi seule.

- Je t'en supplie, réveilles-toi...Murmurais-je. Réveilles-toi!

Je fis tomber mes cheveux devant mes yeux, et m'écroulais sur le torse d'Ahàron, le cœur endolori. Je murmurais une berceuse incompréhensible, en Satana, m'imbibant de son odeur arborée.
Et puis je fermais les yeux.
Reviens ; reviens. Ne me laisses pas ; plus.
Le noir était trop noir. Trop sombre. Trop atone. Trop mort.
Où était son esprit?

Je sais que tu es là, mon amour. Je le sais.

Chercher...M'agripper à sa vie, aux battements de son coeur à travers sa chemise.
L'aimer de toutes mes forces.
Chercher à en crever, à m'en détruire le cerveau, à me réduire en explosion.
Mais chercher. Parce qu'il n'était pas partit.
Je sais que tu es là. Je te trouverais.

Par amour, je te trouverais. Sinon à quoi bon?
A quoi bon tout, toi, moi, la vie, et ça...

Et le désespoir me mena à une ombre. Un flottement. Lointain, mais si proche.
Un flottement. Rien d'autre, mais c'était déjà tant! L'étincelle d'un espoir.
D'une lueur.

Ton esprit brille. Tu le savais?
Je vais te ramener sur la barque des méandres de la vie. Excuse-moi, excuse-moi. Est-ce ma faute?
Mais mes pensées se joignirent à celles du flottement, et nos deux souffles, nos deux enveloppes charnelles se rallièrent. Je l'entendis hurler. Crier mon nom comme celui d'un ange revenu du bataillon. Hurler mon nom à la lune. Crier "Lup Mic" à en crever.
C'était sa voix. La voix que je chérissais.
C'est fini. Tu reviens. Éteins la lumière et revis.
C'était long, jamais...
Mais nous savions.
Nous savions que jamais, c'est à peine un instant.
Et je fus projeter, et nous fûmes projeter dans le monde réel.
Je l'avais ramené.
C'est bon, tu peux fermer les yeux.
A ton réveil, il sera là.
Je te le promets.

Le lendemain, à mon réveil, ce fut avec soulagement que j'aperçus le regard d'Ahàron, posé sur moi, alors que ses bras entouraient ma taille.

- Comment tu te sens? M'enquis-je.
- Très bien, sourit-il. Je n'ai pas eu le moindre mal.
- Je suis désolée, Ahàron...fis-je, la mine piteuse. Je ne sais pas comment j'ai fais ça, mais...je regrette. Ce n'était pas vo...
- Chut, me coupa-t-il. Ce n'est pas toi, Lup Mic. C'est...ça n'aurait pas pu arriver. Tu as un esprit fort, puissant, Lup Mic, mais...c'est en majeur partie le miens qui devient faible.

Sa voix se fit atone, mélancolique, et sa voix résonna dans les méandres de mon âme. Que voulait-il laisser entendre? Pourquoi son esprit devenait-il faible? Ces questions me donnèrent la chair de poule, mais Ahàron était un mystère.

- Mon voyage s'est bien passé, souris-je en changeant de sujet. Mais...Kia' et Nelkh' ne sont toujours pas rentrées...

Ahàron posa son menton sur mon front, apaisant mon cœur.

- Elles vont revenir. Elles reviennent toujours. Que dirais-tu d'un petit entraînement...littéraire? ça fait longtemps que tu n'as plus lu!
- Effectivement, grimaçais-je. Allons-y!

Et ainsi les jours passèrent, jusqu'à ce que je sâche lire instinctivement, et facilement.